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La ZLECAF Une opportunité de liberté économique pour le continent africain: Défis et perspectives.

Tribune: écrit par Ley Mitchely Koumba M’backoux, Rédacteur chez IPSA

La Zone de Libre-échange continentale africaine, est un projet lancé en 2012 par l’Union africaine réunissant la totalité ou presque des pays africains, dont l’objectif principal vise notamment : l’élimination progressive des tarifs douaniers et des barrières non tarifaires ; l’amélioration de la coopération dans le domaine des obstacles techniques au commerce et des mesures sanitaires et phytosanitaires ; le développement des chaines de valeurs aux niveaux régional et continental ; le renforcement des traits du développement et l’industrialisation de l’Afrique.

La Zlecaf est la plus grande zone de libre-échange au monde dotée d’un marché de 1.2 milliard de consommateurs pour un PIB d’environ 2 500 milliards de dollars US. C’est un marché qui offre la possibilité aux pays africains de renforcer le commerce entre eux dans un espace vaste et sans paiement de droits de douanes pour les pays africains, ce qui favorisera la transformation des matières premières sur place dans une approche chaîne de valeurs qui aura des répercussions importantes en termes de création d’emplois.

En effet, selon un rapport de la Banque mondiale, grâce à cette ouverture économique, plus de 30 millions d’africains vont sortir de leur statut d’extrême pauvreté et plus de 68 millions sortiront de leur statut de pauvreté modérée. C’est une grande évolution quand on sait que plus de 400 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en Afrique. En 2019, l’Afrique représentait 2,8 % du commerce mondial et le commerce intra-régional ne représentait que 4,4% du commerce continental total. Les économies africaines sont des économies de rente, basées sur la production et l’exportation des matières premières. Les exportations extra-continentales de l’Afrique montrent la place qu’occupent les matières premières et montrent aussi que le continent est vulnérable à d’autres facteurs tels que la demande mondiale ou l’instabilité des prix des matières premières. Les pays africains devraient donc grâce à la Zlecaf inverser les tendances de leurs économies et beaucoup plus s’industrialiser afin de développer le secteur des exportations extra-continentales et favoriser des exportations “made in Africa”. La part des produits transformés dans les exportations extra-continentales ne s’élève qu’à hauteur 17% contre 41% pour le commerce intra-africain.

Une intégration régionale poussée a donc le potentiel de générer plus d’opportunités de gravir les échelons technologiques pour exporter des produits transformés à l’extérieur du continent.

D’une part, la Zlecaf devrait augmenter le commerce grâce à la libéralisation tarifaire et à la suppression des barrières non tarifaires et d’autre part, elle devrait attirer les investissements pour renforcer la capacité de production pour répondre à la demande régionale croissante.

Cependant, malgré la bonne volonté et l’optimisme des dirigeants africains, beaucoup de défis sont à surmonter pour la réalisation de ce projet. On peut penser notamment à la paix et la sécurité, à la corruption, à la logistique pour le transport des productions ou encore aux politiques et infrastructures fortes pour favoriser l’entreprenariat.

Les défis

Actuellement, la moitié des Opérations de Maintien de la Paix (OMP) réalisées par les Nations Unies se localise sur le continent africain. Les pays comme le mali, le Soudan, la République Démocratique du Congo, la Centrafrique, le Niger ou le Burkina-Faso pour n’en citer qu’eux vivent des situations de trouble en luttant contre le terrorisme grandissant à leurs portes ou encore en étant le théâtre de coups d’Etat militaires.

Ces situations conflictuelles vont complètement en désaccord avec le projet de la Zlecaf. Comme nous l’avons récemment vu avec la situation entre le Mali et la CEDEAO, les conflits internes des pays influent également sur la région entière. La CEDEAO a sanctionné le Mali après le coup d’Etat militaire qui y a eu lieu et cela perturbe énormément l’économie de la zone. Un des premiers défis pour les pays africains est donc de créer des conditions propices à la paix et à la sécurité en Afrique pour permettre une activité économique plus fluide.

 

Ensuite vient le problème de la corruption. Selon le rapport du Statista Research Department publié en mars 2022, sur les 13 pays les plus corrompus au monde, 7 sont issus du continent africain. Cela en dit long sur le niveau de corruption sur le continent. Chaque jour des scandales éclatent sur des fonds détournés, sur des mallettes qui circulent et autre. La corruption est un problème que les dirigeants africains promettent de combattre à chaque nouvelle échéance électorale mais sans grande avancée. Récemment encore, dans plusieurs pays, on a soupçonné des détournements des fonds alloués pour la gestion de la Covid-19. Pourtant, pour que règne la confiance entre les acteurs économiques des différents pays, le problème de la corruption est un autre défi à surmonter.

 

De plus, comme le souligne Mamadou Ndione, vice-président des chargeurs africains, “l’Afrique ne gère pas encore des pans entiers de sa logistique notamment le transport multimodal. Relever le défi logistique, c’est d’abord résoudre les équations infrastructurelles du continent marquées encore par un enclavement de beaucoup de zones de production”. Les voies de communication routières ou ferroviaires ne sont pas développées entre les pays africains et même à l’intérieur des pays. Cela pose un véritable problème pour le transit et l’acheminement des marchandises. Sans oublier le fait que certains pays africains ne sont pas à la pointe dans le domaine du numérique et que cela accentue la lenteur de l’administration qui est un autre facteur à prendre en compte pour une opérationnalisation de la zlecaf.

Enfin, un autre défi est de développer dans les pays africains un secteur privé national fort et compétitif. Il faudra favoriser l’entreprenariat en mettant en place des politiques fortes visant à encourager les entreprises locales et permettre leur extension hors des frontières nationales. Le secteur privé africain dépend encore trop des financements extérieurs et gouvernementaux. Il faudra donc une diversification des sources de financement de ce secteur, qui dépend fortement des institutions financières internationales. Un secteur privé fort est un atout pour l’économie.

La Zlecaf c’est 1,2 milliard de consommateurs

La Zlecaf, plus qu’un projet est une opportunité pour l’Afrique. C’est un projet optimiste et comme nous le dit M. Wamkele Mene, Sécrétaire général su Secrétariat de la Zlecaf, il ravira les commerçants africains et accélérera l’industrialisation du continent. La Zlecaf c’est 1,2 milliard de consommateurs et une réduction sur le long terme de la pauvreté en Afrique. L’Afrique possède 42 des 63 éléments de la quatrième révolution industrielle nous rappelle M. Mene. Avec la zlecaf et l’industrialisation rapide du continent, les pays africains exporteront moins de matières premières et favoriseront la production et l’exportation des produits made in Africa. Cela aura pour conséquence d’augmenter les exportations extra-continentales et même de vendre la culture africaine au-delà des frontières africaines. Plus de travail, plus d’infrastructures, plus de routes et une attractivité économique fluide et productive sont donc les attentes de cette libéralisation des économies africaines. Toutefois pour que cela soit opérationnel, les dirigeants des pays africains doivent faire face à de nombreux défis. L’instabilité politique de plusieurs pays africains, les situations conflictuelles liées au terrorisme présentes de part et d’autre du continent, la corruption ou encore le faible taux d’entreprenariat en Afrique, sont autant de problèmes à résoudre pour que les populations puissent jouir des retombées de la mise en œuvre de la zlecaf.

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